Auriez-vous l’idée de recevoir à dîner votre patron tous les lundis ? De souper jusqu’à l’aube après l’Opéra chaque mardi ? De passer un scanner et de vous faire opérer le mercredi ? D’acheter une maison le jeudi ? D’enterrer votre meilleur ami tous les vendredis ? Et de vous marier chaque samedi ? Certains événements doivent rester exceptionnels, sous peine de se dénaturer et de devenir insupportables. Ainsi, dans la vie des hommes, les célébrations religieuses marquent des moments forts de l’année ou de l’existence qu’elles contribuent à inscrire dans la mémoire collective. Romains, Grecs ou Égyptiens, toutes les civilisations antiques connais-saient les cérémonies liées aux cycles des saisons, aux étapes de la vie des enfants des hommes, mais aussi aux circons-tances graves comme les guerres, les famines et les épidémies.
Si l’Église catholique était simplement une religion des hommes à la manière de toujours, il serait vraiment abusif de demander à tous de venir à la messe chaque dimanche que le Bon Dieu fait. Une telle répétition lasserait l’attention des uns et la motivation des autres, les cérémonies deviendraient formelles et mécaniques, expédiées par un clergé démotivé, subies par des fidèles exaspérés, ennuyeuses et poussiéreuses, une corvée à laquelle on tenterait de soustraire tout en s’y rendant de mauvais gré : arrivés en retard, la plupart tâche-raient de partir en avance, soulagés de s’être acquittés de cette pesante obligation jusqu’à la prochaine fois. Heureusement, ce n’est pas le cas, n’est-ce pas ? Et dans leur sagesse nou-velle, les fidèles d’aujourd’hui se gardent bien d’abuser de la possibilité d’une pratique hebdomadaire, là où elle leur est encore offerte !
Trêve d’ironie sur un sujet aussi grave, la question est de savoir si nous croyons ou non pour de bon au Fils de Dieu venu dans notre chair. C’est la foi qui change tout : offerte à tous, quelle que soit leur nationalité, leur culture ou même leur « religion », elle en fait des frères dans la communion de l’amour du Père, du Fils et de l’Esprit Saint. Alors la messe n’est pas une cérémonie religieuse comme une autre. Elle est l’actualité de la passion du Christ qui relève le monde aujourd’hui, le partage de son Corps ressuscité, Pain de vie, à la table heureuse qui rassemble la famille de Dieu dans sa maison, le don de son Sang qui sauve du péché et de la mort les hommes tenus en esclavage, l’annonce vivante de sa venue dans la gloire pour le festin des noces de l’Agneau. Alors, tous les dimanches, ce n’est pas trop souvent, c’est « trop bien », n’est-ce pas, les enfants ?
Marc Lambret, curé