Jésus et la femme pécheresse
Une rencontre étonnante, choquante. C’est certainement un épisode historique de la vie de Jésus. La pécheresse de l’his-toire est, en tout cas, « une femme de mauvaise vie ». Certains rabbins prétendaient qu’un Juif fidèle devait garder entre lui et une telle femme une distance d’au moins deux mètres. Jésus, lui, se laisse toucher, et de quelle manière ! Simon le pharisien ne s’est pas trompé. « Si cet homme était prophète, il saurait qui est cette femme qui le touche, et ce qu’elle est : une pécheresse ». C’est à n’y plus rien comprendre ! La question rejaillit inévitablement sur Jésus : il ne peut pas être un prophète, un envoyé de Dieu.
Il est tout aussi étonnant de remarquer que les deux autres rencontres majeures de Jésus avec des femmes, la Samaritaine et la femme adultère, concernent des femmes qui ont des « problèmes » avec leur vie affective ! Or Jésus ne commence pas par faire des reproches à ces femmes. C’est même à la Samaritaine qu’il révèle, pour la première fois, qu’il est le Messie ! Jésus trop libéral en matière de mœurs ?
Soyons plus attentifs ! Jésus, parce qu’il est totalement habité par la plénitude que lui donne son Père, est parfaitement maître de tout son être, y compris son corps. Il ne se laisse pas troubler par les embrassements de la femme. Mais il voit au-delà des apparences. Il sait que cette femme est à la recherche désespérée d’un amour authentique. Lui seul est capable de le lui donner. Et il sait que s’il repousse cette femme, il l’enferme à jamais dans sa misère humaine. Il sait bien que sa vie ne correspond pas à la volonté de Dieu sur l’amour humain. Mais il sait aussi que, pour sauver cette femme, il doit lui révéler un Dieu qui l’aime plus qu’elle n’aime ses péchés. Alors, il l’accueille avec ce qu’elle est actuellement capable de lui donner. Et c’est l’éblouissement pour cette femme ! Enfin, elle est aimée pour elle-même ! Elle peut naître à l’amour véritable.
L’attitude de Jésus – l’a-t-on suffisamment reconnu ? – devrait être le modèle de l’attitude de l’Église dans le domaine des mœurs : non pas une banalisation, ni l’application purement légaliste d’une norme morale, ni une condamnation, encore moins une obsession, mais un respect, toujours et malgré tout, et surtout un amour toujours plus grand donné aux pécheurs que nous sommes. Alors, et alors seulement, nous pouvons peu à peu sortir de nos ornières pour découvrir la lumière.
Père Joseph HUNT