LA FOI
GROSSE COMME UNE GRAINE DE MOUTARDE
Dans la suite de l’Évangile de saint Luc, Jésus a invité les siens à pardonner sans mesure (Luc 17,4). Cela leur paraît-il impossible ? En tout cas, ils se tournent vers lui, et nous avec eux : « Augmente en nous la foi ! » Le « petit troupeau » des Apôtres, que le souffle pascal entraînera dans les champs du monde pour y semer le Christ, devine bien que la foi est d’abord un don, une grâce. Nul ne la conquiert, ne l’achète, ne la gagne : on ne peut que la demander, l’implorer d’un Autre, du « Seigneur » auquel la foi s’adresse par excellence.
Sans répondre directement à leur prière, Jésus recourt à une image paradoxale qui exprime l’incroyable vitalité de la foi. Tel un levier qui soulève bien plus que son poids, un rien de foi est capable de réaliser l’impossible, l’extraordinaire : comme de déraciner un grand arbre et de le planter dans la mer ! Pour s’en convaincre et saisir sur le vif la puissance de révolution qu’elle met en œuvre, il suffit de vérifier, à l’école d’un croyant authentique comme saint Paul, ce que devient l’existence humaine la plus banale : « Pour moi vivre, c’est le Christ ! » (Ph 1,21) La foi est en lui participation toute gratuite à l’existence même du Seigneur ressuscité. C’est vraiment l’homme tout entier, corps, esprit et cœur qui se trouve ainsi saisi, transformé, soulevé, en sorte qu’il puisse, au sein du monde, vivre déjà le règne de Dieu. La foi, c’est la Parole qui se renouvelle, la vérité en expansion, la tentative de faire refleurir l’Évangile à chaque génération.
Alors parce qu’il sait reconnaître l’agir même du Seigneur dans les fruits extraordinaires de son labeur, le croyant ap-prend à ne se prévaloir en rien de sa foi. En lui, n’est-ce pas le Christ qui suscite, conduit, et, s’il le veut, récompense finalement la foi ?
Père Joseph Hunt